Le baryton québécois est attachant, tant par l’élégance de son art que le choix, subtile et éclectique, de son répertoire. Heureusement qu’il reste nos cousins d’outre-Atlantique pour défendre avec tant de flamme et talent certains trésors de la musique française! Les Parisiens l’ont entendu dans Fortunio, Ciboulette et, tout récemment, Monsieur Beaucaire; les Marseillais viennent de le fêter dans Hamlet de Thomas. Mais le voici à l’Instant Lyrique pour ouvrir un coffre riche en joyaux délicats: les chansons grises de Reynaldo Hahn et les chansons gaillardes de Francis Poulenc. La sensibilité opalescente de la Belle Époque, la cocasserie canaille des Années folles: deux univers dans lequel Lapointe se glisse avec intelligence et virtuosité, le sourire succédant aux larmes, le temps de ces instantanés. Alors qu’il chante « L’Heure exquise », le temps semble aussi suspendu que le public l’est à ses lèvres.
Nicolas d’Estiennes d’Orves, Diapason, décembre 2016
Aurait-on jamais pensé que Jean-François Lapointe, ce Pelléas attitré – il a interprété le rôle un peu partout dans le monde –, cet Hamlet « inquiétant et pourtant agile » – début octobre encore à Marseille –, ce Beaucaire radiophonique, gascon et bretteur – dimanche dernier à Paris –, ce Valentin héroïque, ce futur Wolfram à Monte-Carlo en français au printemps prochain, ce Don Juan aussi, pouvait-on imaginer donc que le baryton québécois, abonné aux plus grands rôles tragiques, pût également être drôle. Sous le dôme constellé d’Elephant Paname, le temps d’un Instant lyrique où la salle, bidonnée, se retient d’applaudir après chaque numéro, son compatriote, Lionel Daunais, lui permet de donner libre cours à une fantaisie insoupçonnée.
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